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Lettre aux CSE – Mai 2024

Lettre aux CSE – Mai 2024

 

 

Tout travailleur participe, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination
collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises.
(Art 8 Préambule Constitution de 1946)

 

I. Législation – Quelques rappels

❖ Rapport de fin de mandat

 

L’article R.2315-39 du code du travail pose une obligation générale : les membres du CSE sortant rendent compte au nouveau comité de leur gestion, y compris des attributions économiques et des activités sociales et culturelles du comité. Ils remettent aux nouveaux membres tous documents concernant l’administration et l’activité du comité. Quand bien même le décret de 2017 relatif au CSE ne donne pas de détails sur le contenu de ce rapport, il convient de retenir qu’il a pour objectif de faciliter l’intégration de nouveaux élus, de dresser le bilan des AEP et ASC, de présenter le patrimoine du CSE et de faire un état des lieux administratif et juridique.

 

❖ Harcèlement sexuel

 

Le CSE doit désigner un référent en début de mandat. Ce référent doit suivre une formation adéquate, intégrée à la formation santé, sécurité et conditions de travail, pour bien maîtriser les notions et apprendre à réagir avec neutralité et objectivité. Pour les CSE de petites entreprises, le rôle du référent est souvent limité à l’enregistrement des plaintes et à leur transmission à la DRH . Il est important de rappeler que le référent doit respecter la confidentialité et ne pas pré-instruire les dossiers. Le CSE peut souhaiter que le référent participe aux enquêtes menées par la DRH à la suite d’une plainte. Le législateur n’a pas inclus le harcèlement moral dans le rôle des référents au harcèlement sexuel et aux agissements sexistes.

 

❖ Discrétion du CSE

 

Les représentants du personnel sont soumis à une obligation de discrétion uniquement si l’information présente une nature confidentielle pour l’intérêt légitime de l’entreprise et l’employeur doit indiquer explicitement le caractère confidentiel de l’information, soit avant, soit au moment de la réunion du CSE. Cette indication ne peut pas être donnée après la réunion.
Si l’employeur abuse de son droit et impose la discrétion de manière arbitraire, le CSE peut demander la levée de la confidentialité et, si nécessaire, saisir le tribunal judiciaire. Les membres du CSE sont également tenus à une obligation de secret professionnel pour toutes les questions relatives aux procédés de fabrication. Contrairement à l’obligation de discrétion, le secret professionnel doit être respecté sans qu’il soit nécessaire pour l’employeur de faire une déclaration expresse. La communication du CSE est également soumise à la loi sur la liberté de la presse en matière de diffamation et d’injure. Le procès-verbal des réunions du comité ne peut contenir ni inexactitudes, ni propos injurieux, ni allégations diffamatoires.

 

❖ Transparence du CSE

 

La communication du CSE doit répondre à une finalité de transparence imposée par le législateur. Le CSE doit informer les salariés de toutes ses décisions et résolutions, adoptées par un vote en réunion plénière à la majorité des présents (Code du travail, art. L. 2315-32). Le procès-verbal (PV) des réunions du CSE, qui retranscrit les débats, les votes et les avis du comité, doit être affiché ou diffusé dans l’entreprise par le Secrétaire du comité (Code du travail, art. L.2315-35). Le CSE doit également porter à la connaissance des salariés, chaque année et par tout moyen, ses comptes annuels et les différents rapports qu’il est tenu d’établir (Code du travail, art. L. 2315-72). Il doit notamment établir un rapport sur ses activités et sur sa gestion financière, de nature à éclairer les salariés sur l’analyse des comptes du comité (Code du travail, art. L. 2315-69). Notons enfin que le Trésorier (ou le Commissaire aux comptes – pour les grands CSE) doit également présenter un rapport sur les conventions entre le CSE et les élus (cf. ci-dessous – conflits d’intérêts).

 

❖ Conflits d’intérêts

 

Pour prévenir les conflits d’intérêts, le Comité Social et Économique (CSE) peut se référer à l’article L2315-70 du Code du travail qui exige un rapport du Trésorier sur les conventions pour l’ensemble des CSE. Ce rapport, rédigé par le commissaire aux comptes, est souvent négligé par les élus des CSE de petite ou moyenne taille. De plus, le CSE peut demander à chaque membre de remplir une déclaration sur l’honneur en début de chaque exercice concernant les conventions conclues entre le CSE, ses membres et leurs proches. Il est également possible de demander que chaque membre déclare les entreprises et autres structures dans lesquelles ils détiennent des intérêts, sous réserve de respecter la réglementation RGPD.

 

II. Jurisprudence

 

❖ Un CSE ne peut pas imposer une condition d’ancienneté pour pouvoir bénéficier des ASC

 

La Cour de cassation a récemment statué sur la question de l’accès aux activités sociales et culturelles (ASC) au sein des entreprises. Selon sa position, il est impossible de conditionner l’accès aux ASC à une ancienneté minimale. Le CSE a la liberté de sélectionner les ASC qu’il souhaite offrir aux salariés. Cependant, il ne peut pas imposer une condition d’ancienneté pour y accéder. Les ASC du CSE doivent être ouvertes à tous les salariés, indépendamment de leur ancienneté. Même les nouveaux embauchés doivent pouvoir en bénéficier. La Cour de cassation se base sur les articles L. 2312-78 et R. 2312-35 du Code du travail pour affirmer cette position.

Cass. Soc. 3 avril 2024, n° 22-16812

❖ Nomination d’un expert-comptable – Projet important.

 

Le CSE a le droit de consulter un expert lorsqu’il est confronté à un projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail (Code du travail, art. L. 2315-94). Le recours à un expert peut être source de conflit et de contestation par l’employeur. Cela est principalement dû au fait que le recours à un expert peut prolonger le délai de consultation du CSE et coûter à l’employeur, qui doit prendre en charge 80% des frais (Code du travail, art. L. 2315-80, 2°). De plus, pour être efficace et utile, le recours à un expert devrait intervenir lors de la première réunion de présentation du projet par l’employeur, même si la désignation d’un expert n’est pas expressément prévue à l’ordre du jour de la réunion. Les juges admettent cependant que le CE (transposable au CSE) puisse voter des résolutions ayant un rapport direct avec un point de l’ordre du jour (Cass. Soc., 10 octobre 1990, n°89-12983). Ainsi, il découle de cette position que la question de la désignation de l’expert n’a pas à être obligatoirement inscrite à l’ordre du jour de la réunion portant sur la consultation obligatoire. La faculté de déclencher l’expertise découle du fait que la consultation et son objet soient inscrits à l’ordre du jour.

❖ Information sur l’étendue de la mission de l’expert-comptable sélectionné par le CSE sur la situation économique et financière

 

Dans cet arrêt, la Chambre sociale clarifie que la mission de l’expert-comptable, désigné par le CSE pour la consultation sur la situation économique et financière de l’entreprise, peut inclure l’examen de la situation et du rôle de l’entreprise au sein du groupe. Cependant, l’expertise ne peut se concentrer que sur l’année en cours et les deux années précédentes.

Cass. Soc., 1er juin 2023, n°21-23.393

❖ Il n’est pas possible pour le CSE d’établissement de choisir un expert pour évaluer la situation économique et financière (SEF)

 

Le CSE d’établissement peut désigner un expert uniquement si la consultation sur la situation économique a été redescendue au niveau de l’établissement. Ce niveau de consultation peut se faire soit dans le cadre d’un accord collectif qui définit les niveaux et l’articulation des consultations entre le CSE central et les CSE d’établissement (conformément à l’article L.2312-19), soit lorsque l’employeur décide de consulter spécifiquement le CSE d’établissement sur la situation économique et financière de l’entreprise (conformément à l’article L.2312-22). En l’absence d’accord collectif ou de décision de l’employeur, le CSE d’établissement ne peut pas désigner un expert sur la SEF.

Cass. Soc., 20 septembre 2023, n°21-25.233

❖ Les seules pertes d’exploitation ne sont pas suffisantes pour justifier un licenciement

 

En dépit d’une augmentation du chiffre d’affaires, le simple fait d’avoir des résultats d’exploitation déficitaires pendant trois années consécutives ne constitue pas une justification suffisante pour un licenciement économique. Les juges de la Haute juridiction ont estimé que l’employeur n’avait pas apporté de preuves adéquates concernant l’ampleur des difficultés économiques, étant donné la croissance du chiffre d’affaires.

Cass. Soc., 18 octobre 2023, n°22-18.852

❖ Explication économique de la cessation d’activité et justification du licenciement

 

L’article L.1233-3, alinéa 4 du Code du travail stipule que la cessation d’activité complète et définitive de l’entreprise constitue en elle-même un motif économique de licenciement, que cette cessation soit effective au moment du licenciement ou qu’elle soit irrémédiablement engagée lors du licenciement. Cependant, il est important de noter que le maintien d’une activité résiduelle, nécessaire à l’achèvement de l’exploitation de certains produits avant leur cession à une autre entreprise du groupe, ne caractérise pas, une poursuite d’activité.

Cass. Soc., 20 septembre 2023, n°22-13.485

❖ Seuls les membres du CSE ont de droit de contester le non-respect du délai concernant l’ordre du jour

 

L’employeur ne peut remettre en question une procédure d’alerte économique votée préalablement par le Comité Social et Économique (CSE) sous prétexte que le point concerné aurait été inscrit à l’ordre du jour au-delà du délai conventionnellement prévu. La chambre sociale précise en effet que seuls les membres de la délégation du personnel au CSE peuvent invoquer la prescription relative au délai de convocation et de communication de l’ordre du jour, instaurée dans leur intérêt.

Cass. Soc., 28 juin 2023, n°22-10.586

❖ Les objectifs nécessaires à la détermination de la rémunération variable doit être rédigés en Français s’ils ne sont pas reçus de l’étranger, ou destinés à des étrangers, même si la langue de l’entreprise est l’anglais

 

Peu importe que la langue de travail dans l’entreprise soit l’anglais et que le salarié la parle et la comprenne parfaitement, ses objectifs doivent être rédigés en français. L’exception à cette règle prévue par l’article L.1321-6 du Code du travail est limitative : le juge ne saurait retenir une autre exception à la règle selon laquelle les objectifs imposés aux salariés doivent être rédigés en français.

Cass. Soc., 7 juin 2023, n°21-20.322

❖ Elections et renouvellement membres du CSE

 

Les années 2023 et 2024 sont marquées par le renouvellement de nombreux Comités Sociaux et Économiques (CSE). Pour sécuriser le processus des élections professionnelles, il est important de prêter attention à certains points tel qu’examiner les listes électorales, assurer une représentation équilibrée entre femmes et hommes sur les listes de candidats et déposer les listes de candidats dans les temps. Il est donc important d’assurer une représentation équilibrée entre femmes et hommes sur les listes de candidats. Cette règle implique, en cas de pluralité de sièges à pourvoir, que les organisations syndicales présentent à minima deux candidats : l’un appartenant au sexe majoritaire et l’autre au sexe minoritaire

Cass. Soc., 5 janv. 2022, n° 20-17.227

III. Lois nouvelles – Activités

 

❖ Partage de la valeur : Un grand sujet d’actualité pour les CSE.

 

La loi sur le partage de la valeur dans l’entreprise (loi 2023-1107) a été votée le 29 novembre 2023 et s’applique à compter du 1er décembre 2023, à l’exception de certaines dispositions. A travers de nouveaux dispositifs et l’aménagement de dispositifs existants, la loi a pour objectif de :.

  • Faciliter la généralisation des dispositifs de partage de la valeur ;
  • Simplifier la mise en place de dispositifs de partage ;
  • Développer l’actionnariat salarié ;
  • Intégrer des indicateurs liés à l’égalité femme-homme et la RSE.

La loi fait donc évoluer la PEPA, « prime exceptionnelle de pouvoir d’achat » ou prime Macron, en « prime de partage de la valeur » (PPV) en pérennisant le principe du versement d’une par voie d’accord ou par décision unilatérale, avec consultation préalable du CSE.

❖ Informations de durabilité – Rôle du CSE

Ord. 2023-1142 du 6-12-2023

À partir du 1er janvier 2025, certaines grandes sociétés, sociétés consolidantes de grands groupes et PME cotées devront consulter leur CSE sur les informations de durabilité. Le contenu de la BDESE a été en partie adapté en raison de la suppression de la déclaration de performance extra-financière.
L’article 26 de l’ordonnance 2023-1142 du 6 décembre 2023 transposant la directive dite « CSRD » institue à partir du 1er janvier 2025 pour certaines entreprises une nouvelle obligation de consultation de leur comité social et économique (CSE) sur les informations de durabilité que devra inclure leur rapport de gestion.
UNE NOUVELLE OBLIGATION DE CONSULTATION DES CSE POUR LES GRANDES ENTREPRISES, LES SOCIÉTÉS CONSOLIDANTES DES GRANDS GROUPES ET LES PME
L’article L 2312-17 du Code du travail, qui contient les dispositions d’ordre public relatives aux consultations récurrentes du CSE, est complété par trois nouveaux alinéas.

30/05/2024 -